Au milieu du raz-de-marée de mesures austéritaires lancé par François Bayrou mardi, une nouvelle idée pour «remettre la France au travail» s’est glissée subrepticement : la possibilité pour les salariés de monétiser leur cinquième semaine de congés payés. En clair, travailler davantage, contre rémunération.
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Dans la présentation de son plan pour le projet de budget 2026, le Premier ministre dans sa posture de «père la rigueur» a annoncé qu’il allait proposer aux partenaires sociaux d’ouvrir des négociations sur l’assurance chômage, mais aussi sur le droit du travail. Lors de la même conférence de presse, la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a ensuite précisé que «la possibilité de monétiser la cinquième semaine de congés payés» ferait partie des pistes qui seraient soumises à la discussion. Cette dernière doit être encadrée par un document d’orientation du gouvernement.
Ce jeudi 17 juillet, la ministre a précisé sur les réseaux sociaux que cette proposition était «un droit nouveau», qui «resterait à la main de chaque salarié» et qui serait soumise aux partenaires sociaux. Ce n’est «absolument pas une mesure ou une décision unilatérale du gouvernement, dont les paramètres sont fixés à l’avance», a-t-elle insisté.
«Musée des horreurs»
Ce ballon d’essai semble toutefois loin d’atterrir, à l’heure actuelle. Et il sème un peu de trouble dans la communication gouvernementale. Interrogé par la presse lors d’un déplacement à Metz ce jeudi 17 juillet au matin, le ministre de l’Economie et des Finances, Eric Lombard, a botté en touche, en assurant ne pas avoir «vu» cette mesure «dans nos propositions». «On prend les idées, mais celle-là, je ne l’ai pas vue», a-t-il ajouté.
En début d’après-midi, son ministère a ensuite précisé qu’Eric Lombard avait répondu à une question «qui portait largement confusion», car cette proposition ne relève pas du budget 2026. Mais elle sera bien «discutée avec les partenaires sociaux, dans le cadre du plan travail». De fait, l’avenir d’une telle mesure dépend de ce qu’en feront ou non les organisations syndicales et patronales si des discussions démarrent bien cet automne.
Reste que cette éventuelle monétisation de la cinquième semaine de congés payés ajoute à la colère des syndicats de salariés. Cela fait partie «du musée des horreurs» des idées du gouvernement, a fustigé ce jeudi la leader de la CFDT, Marylise Léon sur France Inter. «Aujourd’hui, le sujet numéro un, c’est la question effectivement du pouvoir d’achat, mais ce n’est pas aux salariés eux-mêmes de se payer un peu plus de marge de manœuvre pour boucler les fins de mois en rognant sur leurs congés», a -t-elle ajouté.
«Des mesures profondément injustes»
«Le monde du travail ne peut pas admettre des mesures profondément injustes et des efforts absolument pas partagés», a-t-elle prévenu. Quant à la question de l’assurance chômage, «quand j’entends François Bayrou nous expliquer qu’il faut encore [la] réformer parce que c’est un frein à l’emploi, c’est “un jour sans fin”. J’ai l’impression de me réveiller en 2017, quand on nous a expliqué qu’il y avait un problème d’emploi à cause de l’assurance chômage.»
Plus globalement, la numéro un de la CFDT a dit être «tout à fait lucide sur le fait que la situation est grave et qu’il y a besoin d’avoir un budget particulier» mais il ne faut pas que ce dernier se fasse aux dépens de la «transition écologique» ou de la «justice sociale».
Dans ce contexte, la mobilisation de la CFDT, premier syndicat de France n’est «absolument pas exclue», selon Marylise Léon. «Là c’est le temps de la discussion […] mais ça fait partie du panel de la possibilité d’actions.» Mercredi matin, la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, a clairement évoqué une mobilisation de son organisation à la rentrée. Les cinq principales organisations syndicales ont prévu d’échanger ce vendredi leurs points de vue sur les suites à donner aux annonces de François Bayrou.
Mise à jour à 18h10 avec la réaction de la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet.